Chiara Luce: Jouer la partition de Dieu
Par les dix-huit années de sa vie, Chiara Luce est un véritable exemple de sainteté. Premier membre des Focolari béatifié, elle a vécu de manière héroïque sa maladie grave, entièrement unie à Jésus dans sa Passion.
© CSC/Focolari
Chiara Badano naît à Sasselo dans le Nord-Ouest de l’Italie le 29 octobre 1971. Ses parents, Ruggero et Teresa, qui l’ont attendue pendant onze ans, l’accueillent avec joie, comme un cadeau de la Vierge. Elle grandit dans un climat familial aimant et reçoit une solide éducation chrétienne. Dès son plus jeune âge, elle fait preuve d’une grande générosité. À quatre ans, elle décide de donner ses plus beaux jouets à des enfants démunis : « Je ne vais quand même pas donner des jouets cassés à des enfants qui n’en ont pas ! ». Elle met également ses économies dans une petite boîte, pour les « petits Africains » ; plus tard, elle rêvera qu’elle part en Afrique en tant que médecin, pour soigner ces enfants. C’est une petite fi lle normale, mais avec un quelque chose en plus : elle est docile à la grâce et au dessein de Dieu sur elle, qui se dévoilera peu à peu. Le jour de sa première communion, elle reçoit en cadeau les Évangiles. Ce sera pour elle un « magnifique livre » et « un extraordinaire message ». Elle dira : « De même qu’il est facile pour moi d’apprendre l’alphabet, je dois aussi apprendre à vivre l’Évangile ! ».
En 1980, elle découvre le mouvement des Focolari et devient une Gen (nom donné aux jeunes du mouvement). À partir de ce moment, sa vie sera une ascension constante, dans sa tension à « mettre Jésus à la première place ». Elle aime la vie, la musique, la natation, le tennis, les randonnées en montagne. Sa joie attire mais, quand on lui demande si elle parle de Dieu à ses amis, elle répond : « Je ne dois pas parler de Jésus, mais je dois le donner aux autres par ma manière de me comporter ». Elle poursuit ses études et rentre au lycée classique où elle offre à Jésus ses difficultés.
Chiara Lubich et Chiara Luce
Chiara fréquente les rencontres organisées par le mouvement des Focolari. Dans ce cadre, elle vit une forte expérience communautaire de vie chrétienne, selon la spiritualité de l’unité qui caractérise le charisme de Chiara Lubich, et elle s’élance vers les buts apostoliques du mouvement. Avec d’autres Gen, elle approfondit son rapport personnel avec Dieu en recevant l’eucharistie de manière quotidienne. Elle entretient aussi une relation d’amour avec Marie. Elle comprend que, pour aimer, il faut d’abord recevoir l’amour comme un don.
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Chiara Badano entretient un lien épistolaire avec Chiara Lubich qui, à sa demande, lui donne un deuxième prénom : Luce (« Lumière » en italien). En lisant sa correspondance avec Chiara Lubich, on comprend que Chiara Luce grandit dans la compréhension de la parole de Dieu : « J’ai redécouvert l’Évangile sous une nouvelle lumière. Maintenant, je veux faire de ce livre magnifique l’unique but de ma vie. Je ne veux pas et je ne peux pas rester analphabète d’un message aussi extraordinaire ». Chiara fait également preuve d’un amour ardent pour Jésus au moment de sa Passion quand il s’est écrié : « Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné ? » (Mc 15,34 ; Mt 27,46).
Chiara Lubich avait expliqué aux jeunes de son âge : « Le Gen voit dans chaque souffrance une occasion extraordinaire de devenir semblable à Jésus abandonné, et il lui offre sa peine. Si Jésus se sent véritablement aimé, il sait comment vous récompenser : il vous remplit de cette joie nouvelle que vous pourrez transmettre à tout le monde. Ce n’est pas tout : il fera de vous des saints. Courage, Gen ! Remplissons le monde de saints ». Ce à quoi Chiara Luce répond : « J’ai découvert que Jésus abandonné est la clé de l’unité avec Dieu et je veux le choisir comme mon premier époux et me préparer à sa venue ». Elle lit la Parole de Dieu, la médite et réfléchit souvent à l’affirmation de Chiara Lubich : « Je serai sainte si je suis sainte tout de suite ».
Deux années de maladie
À la fin de l’été 1988, Chiara joue au tennis lorsqu’une douleur lancinante lui fait perdre sa raquette. Des examens médicaux révèlent un cancer des os. Elle n’a pas encore dix-huit ans et les projets dont elle avait rêvé s’écroulent. En apprenant le diagnostic, Chiara ne pleure pas, ne se rebelle pas, sûre que Dieu est fidèle et que son amour ne défaillera pas. Il sait, lui, quel est son vrai bonheur.
Son sourire lumineux ne disparaît pas malgré les cures très douloureuses qu’elle subit. Elle offre sa souffrance pour l’Église, pour les jeunes, pour les non-croyants, le mouvement des Focolari, les missions… Chiara perd très vite l’usage de ses jambes. Elle répète : « Je n’ai plus rien, mais j’ai encore le coeur et avec lui je peux toujours aimer ».
Les amis des Focolari alternent les visites à l’hôpital pour la soutenir, elle et sa famille. Les périodes d’hospitalisation à Turin sont de plus en plus fréquentes et, avec elles, les thérapies lourdes qu’elle affronte avec beaucoup de courage : « Pour toi Jésus, si tu le veux, je le veux moi aussi ». Les médecins, certains non pratiquants, sont bouleversés par la paix qui émane d’elle, et plusieurs redécouvrent Dieu. Sa chambre d’hôpital à Turin est un lieu de rencontre, d’apostolat, d’unité. À sa maman qui lui demande si elle souffre, elle répond : « Jésus m’enlève avec du chlore mes taches, et le chlore ça brûle. Ainsi, quand j’arriverai au paradis, je serai blanche comme la neige ».
Elle est convaincue que Dieu l’aime et après une nuit particulièrement éprouvante, elle écrit à Chiara Lubich : « J’ai beaucoup souffert, mais mon âme chantait ». La maladie progresse et la médecine baisse les armes. Chiara sait qu’elle ne guérira pas mais elle est prête à faire la volonté de Dieu. Elle confi e à ses amis : « Vous ne pouvez pas imaginer la relation que j’ai maintenant avec Jésus… Je me rends compte que Dieu demande quelque chose de plus, de plus grand. Peut-être pourrai-je rester sur ce lit pendant des années, je n’en sais rien. La seule chose qui m’intéresse, c’est la volonté de Dieu ; je dois bien faire celle de l’instant présent : jouer la partition de Dieu. Si on me demandait si je veux marcher, je dirais que je ne le veux pas, car ainsi je suis plus proche de Jésus ». Beaucoup insistent pour qu’elle écrive ce message à la Vierge : « Maman du Ciel, je te demande le miracle de ma guérison. Mais si cela n’est pas la volonté de Dieu, je te demande la force de ne jamais céder ! ». Elle souffre beaucoup mais refuse la morphine. « Cela m’enlève ma lucidité et la souffrance est la seule chose que je peux offrir à Jésus ».
À la rencontre de l’Époux
© CSC/Focolari
Chiara se prépare à rencontrer l’Époux. Elle a pensé à tout : sa robe qu’elle veut blanche comme une mariée, les chants et les prières pour « sa » messe ; la liturgie devra être une « fête » et « personne ne devra pleurer ». Lors de sa dernière eucharistie, elle demande qu’on récite : « Viens, Esprit Saint, envoie-nous, du Ciel, un rayon de ta lumière ». Elle ne se plaint pas, toujours tournée vers les autres et particulièrement les jeunes : « Les jeunes sont l’avenir. Moi, je ne peux plus courir, mais j’aimerais leur transmettre le flambeau, comme aux Jeux olympiques. Les jeunes ont une seule vie, et cela vaut la peine de bien la vivre ! ».
Le 7 octobre 1990, en la fête de la Vierge du Rosaire, elle rend son dernier souffle après avoir salué sa maman : « Maman, sois heureuse, car je le suis. Ciao », et souri à son père. Ses parents diront que les deux plus belles années de leur vie furent les années de maladie de Chiara Luce. Deux mille personnes sont présentes à son enterrement et sa réputation de sainteté se répand à travers le monde.
En 1999, Mgr Maritano, évêque du diocèse d’Acqui ouvre son procès en béatification. Elle est déclarée « vénérable » en 2008 et est béatifiée le 25 septembre 2010. On la fête le 29 octobre.
Source: Marine Guillard - www.mavocation.org